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La digitalisation des process achats sécurise les approvisionnements
Finance

La digitalisation des achats pour sécuriser les approvisionnements, maîtriser les coûts et renforcer l’achat durable

La crise sanitaire et la guerre en Ukraine ont eu un impact majeur sur les chaînes d’approvisionnement. Face à cette situation, les directions achats ont fait de la sécurisation de ces approvisionnements une priorité absolue.

Pour atteindre cet objectif tout en maîtrisant les coûts qui y sont associés, elles ont décidé d’accélérer la digitalisation de leurs processus d’achat. Cette démarche présente également l’opportunité de renforcer leur stratégie d’achat durable.

La mondialisation et les externalisations qu’elle induit vers les pays à bas coût a en effet, depuis la crise Covid et la guerre en Ukraine, mis en évidence la trop forte dépendance des entreprises françaises vis-à-vis d’autres pays. Des pénuries et des dysfonctionnements dans la chaîne logistique ont fait bondir les prix et ont allongé les délais d’approvisionnements.

« Aujourd’hui, l’objectif pour les achats est double, précise à ce sujet Isabelle Carradine Pinto, associée spécialiste de la transformation de la fonction Achats au sein de PwC France et Maghreb. Au-delà de limiter les coûts de production, il leur faut en effet sécuriser leur chaîne d’approvisionnement, particulièrement impactée par le contexte géopolitique de ces derniers mois, contexte qui risque de perdurer compte tenu des tensions géopolitiques mondiales et des nouvelles formes d’alliances qui voient le jour ».

Sourcing et relocalisation de nouveaux fournisseurs

Face à cet environnement, plus des deux tiers des dirigeants français cherchent de nouveaux fournisseurs ou ont l’intention de le faire dans les 12 prochains mois.

« Le périmètre de recherche de ces fournisseurs résonne fortement avec l’enjeu de relocalisation industrielle de la France, poursuit Isabelle Carradine Pinto. S’il y a 20 ans la tendance était plutôt au « off shoring » vers des pays lointains et à bas coûts, aujourd’hui, les entreprises tendent à sourcer leurs nouveaux fournisseurs vers des pays voisins et amis, et à privilégier le « near sourcing » ou des circuits courts. Une tendance qui pourrait par ailleurs être renforcée par leur volonté de mieux prendre en compte les risques liés à la chaîne d’approvisionnement et de répondre aux défis (et réglementations) environnementaux et sociétaux ».

« En effet, l’enjeu des achats responsables commence à prendre de l’ampleur, porté par la volonté des entreprises de s’engager davantage sur le terrain environnemental, sociétal et de gouvernance (ESG), mais également par une réglementation sur le sujet de plus en plus contraignante, à l’instar de celle relative au devoir de vigilance ou encore à Scope 3 », ajoute-t-elle.

Le digital, clé de voûte d’une gestion du risque fournisseurs maîtrisée

Face à ce double défi (sécurisation de la chaîne d’approvisionnement et réglementation), les départements achats n’ont d’autre choix que de poursuivre leur transformation digitale. En effet, il incombe à la direction des achats de sélectionner et de référencer de nouveaux fournisseurs fiables et pérennes, et de garantir l’exécution des contrats en temps et en heure.

Il lui revient également de veiller à ce que ces parties prenantes respectent en permanence les exigences de son organisation (comme la qualité, la conformité, les délais, les engagements RSE, etc.) et de parer aux potentielles incertitudes sur des approvisionnements (stratégiques et non stratégiques) susceptibles de menacer la bonne exécution des engagements et des projets de l’entreprise.

Pour chacun de ces points, s’appuyer sur des outils digitaux permet de centraliser les données, de les fiabiliser, de les tracer, de les mettre à jour au fil de l’eau et de les partager facilement avec les parties prenantes. La gestion est plus fiable, l’information plus transparente et le processus plus efficace.

Isabelle Carradine Pinto, associée spécialiste de la transformation de la fonction achats chez PwC France et Maghreb

D’ailleurs, selon l’enquête PwC Digital Procurement (2022), la transformation digitale progresse sur la feuille de route des directions achats. Elles se fixent ainsi des objectifs de digitalisation très ambitieux à horizon 2025 (72 % des processus en moyenne).

« Des objectifs néanmoins atteignables au regard notamment de la diversité des solutions digitales existantes, et qui leur permettent de couvrir l’intégralité des processus achats, et tout particulièrement les offres de Source-to-Contract (StoC) et de SRM (Supplier Rela tionship Management) », précise Isabelle Carradine Pinto.

Les solutions de gestion des contrats déjà bien implantées

Les solutions de Source-to-Contract servent à optimiser le processus d’achat et à gagner du temps lors de la recherche d’un fournisseur. Elles permettent de mettre en oeuvre une stratégie de « sourcing » et de gestion des contrats, d’unifier les procédures et de fluidifier la collaboration entre les différents acteurs concernés par le processus d’achat.

« Elles centralisent en un seul endroit toutes les informations relatives aux fournisseurs (état de conformité, compétences, obligations contractuelles…), contribuant ainsi à réduire les risques fournisseurs », précise Isabelle Carradine Pinto.

C’est ainsi notamment pour maîtriser le risque fournisseurs que le Groupe Axian a mis en place la solution Source-to-Pay d’Oxalys. Initialement spécialisé dans le négoce, Axian est devenu au fil du temps un groupe international dont l’activité s’articule autour de 5 industries à fort potentiel : télécoms, énergie, immobilier, banque, Fintech et Open innovation.

« Nous développons nos activités en Afrique car elles y créent de la croissance et du développement, explique Philippe Prodhomme, directeur financier du groupe Axian, à l’origine du projet Oxalys. Nous participons à l’inclusion technologique et financière des habitants, en intervenant sur des secteurs stratégiques comme les télécoms ou l’énergie, qui nécessitent de relever des enjeux stratégiques en matière de Supply Chain, en garantissant notamment la réactivité et l’intégrité dans nos relations fournisseurs. Une non-qualité de la chaîne Achats peut avoir un impact direct sur nos relations fournisseurs mais aussi sur notre performance globale et même sur l’approbation de nos comptes ».

En 2017, Axian lance un RFI (Request For Information) afin d’identifier des fournisseurs potentiels capables de permettre à l’entreprise de gagner en maturité Achats.

« Nous avons rapidement fait le choix de centraliser le pilotage de nos processus Achats dans Oxalys, tout en développant une interface avec l’ensemble de nos ERP afin de disposer d’une plus grande visibilité, précise Philippe Prodhomme. Aujourd’hui, entre autres bénéfices, les appels d’offres sont plus transparents grâce à la plateforme de sourcing pensée pour assurer un « selfcare fournisseurs » de bout en bout. À terme, la solution couvrira tout le processus, depuis le sourcing et l’intégration de fournisseurs dans une base de données unique, jusqu’à la dématérialisation intelligente des factures, tout en garantissant une relation forte avec les fournisseurs basée sur la réactivité, l’efficacité et la transparence ».

Selon PwC, plus de 81 % des directions achats interrogées dans le cadre de son enquête Digital Procurement, utilisent ainsi déjà une solution de StoC pour gérer leurs processus achats. Les outils de StoC sont d’ailleurs parmi les plus plébiscités par les achats, et vont continuer de l’être dans les prochaines années. C’est notamment le cas pour les PME qui prévoient d’augmenter fortement leurs investissements en transformation digitale Achats, et en particulier dans ces outils.

Une tendance qui devrait se renforcer d’ici à 2025 avec une hausse de 5 points pour le recours aux outils Source-to-Contract (StoC).

L’offre de Supplier Relationship Management portée par la crise Covid

Les solutions de Supplier Relationship Management (SRM) permettent, pour leur part, d’accélérer la collecte de l’information sur les fournisseurs et de l’enrichir en multipliant les moments où l’information est collectée. Tout au long du cycle de vie du fournisseur (appel d’offres, contrat, réception produit, revue annuelle…) l’information est ainsi centralisée depuis différentes sources, internes (système de commande, clients internes) comme externes (fournisseurs, organismes d’État, plateformes d’analyse financière, environnementale ou de risque).

À cet effet, les solutions de SRM sont généralement intégrées à une solution complète de Source-to-Pay et doivent permettre de se connecter facilement à de nombreux systèmes de données externes. Ces outils facilitent par ailleurs l’analyse des informations fournisseurs collectées. À titre d’exemple, Ivalua offre dans sa version 166 une visualisation inédite de la chaîne de sous-traitance des fournisseurs qui permet d’identifier, en un clic, parmi les différents sous-traitants, ceux qui présentent les risques les plus élevés.

Enfin, les solutions de SRM contribuent à l’enrichissement de la relation fournisseur au travers notamment de processus de collaboration.

Prochaine étape : évaluer l’empreinte carbone de toutes les parties prenantes de la Supply Chain

« Gage de la volonté des directions achats de sécuriser leur chaîne d’approvisionnement et de s’engager dans des achats responsables et durables, les deux cas d’usages émergents autour notamment des solutions Source-to-Contract sont la traçabilité de la Supply Chain, et l’évaluation de l’empreinte carbone des fournisseurs », poursuit Isabelle Carradine Pinto.

D’ici à 2025, plus d’un tiers des directions achats interrogées au niveau monde par PwC prévoient d’investir dans une solution d’évaluation de l’empreinte carbone de leurs fournisseurs. Pour le moment, les outils pour accompagner les achats dans ces démarches sont cependant en cours de développement.

« Certaines solutions commencent à émerger, pour par exemple aider les entreprises à calculer leur bilan carbone, l’analyser et en mesurer l’impact sur leur activité », indique d’ailleurs Maryse Lecutier, Leader Consulting Finance France chez EY.


Les achats encadrés par la réglementation

La loi sur le devoir de vigilance publiée le 27 mars 2017

Elle s’applique aux entreprises et aux groupes qui emploient deux années consécutives plus de 5 000 salariés en France ou plus de 10 000 en France et à l’étranger. Ils doivent établir, publier, respecter et évaluer un Plan de vigilance qui identifie les risques et doit prévenir les atteintes graves envers les droits humains et les libertés fondamentales, la santé et la sécurité des personnes, ainsi que l’environnement dans toute leur sphère d’influence, les filiales comme les fournisseurs et les sous-traitants avec lesquels ils entretiennent une relation commerciale établie.

Depuis le 1er janvier 2023, le « Scope 3 » est obligatoire

Le décret n° 2022-982 signé par Agnès Pannier-Runacher, ministre de la Transition énergétique, rend ainsi obligatoire la comptabilisation et la déclaration de l’ensemble des émissions indirectes significatives, incluant ainsi les émissions dites du « Scope 3 » dans les bilans carbone des entreprises réalisés à partir du 1er janvier 2023. Depuis 2010, avec une révision en 2015, la réglementation obligeait déjà les entreprises de plus de 500 salariés et les collectivités de plus de 50 000 habitants à faire un bilan GES (Gaz à effet de serre).

Seuls les Scopes 1 (émissions directes) et les Scopes 2 (émissions dues à l’énergie) étaient dans le périmètre de l’obligation, le Scope 3 relevait jusqu’alors du volontariat. Cela concerne donc toutes les autres émissions induites par les activités de l’organisation qui ne sont pas indiquées au Scope 2, mais qui sont liées à la chaîne de valeur complète, dont l’achat de matières premières, de services ou autres produits, les transports amont et aval des marchandises.

Anne Del Pozo collabore depuis près de 20 ans à différents magazines en qualité de journaliste. Elle y traite de sujets articulés essentiellement autour de la finance, des flottes automobiles, du voyage et du tourisme d'affaires ou encore des ressources humaines et du numérique. Anne del Pozo participe également à la rédaction de nombreux témoignages clients et de newsletters d'entreprise.